La pomme de terre est un incontournable de nos assiettes résilientes, autant pour ses qualités nutritionnelles que pour son goût. Décriées pour leur index glycémique trop élevées, ou adorées pour leur indice de satiété, elles restent fortement consommées par les français : ce ne sont pas moins de 50 à 55 kg de pommes de terre, toutes cuissons confondues, que nous mangeons chaque année ! Quelles pommes de terre choisir ? Quels sont les labels existants ? Pour quelle cuisson ? Vous allez tout savoir !
Quelques chiffres
On compte en France 192 000 hectares de production de pomme de terre, en comptant les plants, les pommes de terre de consommation, et celles destinées à être transformées en fécule. Notons tout de même que 76% de ces terres sont destinées à la pomme de terre de consommation.
Si la pomme de terre a peiné pour s’installer en France (voir plus bas), elle fait aujourd’hui partie des principales cultures françaises : la France est la troisième productrice européenne, derrière l’Allemagne et la Pologne, en produisant 5 millions de tonnes de pommes de terre de conservation. Les principales régions de production sont le Nord-Pas de Calais, la Picardie (elles concentrent les ⅔ de la production française), la Champagne-Ardenne, la Bretagne, le Centre et la Normandie.
Nous l’avons mentionné en introduction, les français consomment en moyenne chaque année 50 à 55 kg de pommes de terre dont 20 à 25 kg de pommes de terre fraîches. Cependant, en 1960, ils en consommaient 92 kg ! La diversification de l’offre alimentaire, surtout pour les céréales et leurs produits dérivés, comme le riz, les pâtes ou même plus récemment le quinoa et le millet, a probablement fait reculer cette part.
Les catégories
1180 variétés de pommes de terre sont à ce jour recensées dans le catalogue européen, et le Centre International de la Pomme de terre (CIP) en comptabilise 7500 dans le monde, dont 1950 sauvages. Il a donc fallu pouvoir classer les pommes de terre, et leurs variétés, pour pouvoir y voir un peu clair pour son choix lors des achats.
Il existe trois catégorisations principales, selon leur mode de culture, leur fermeté, ou leurs capacités culinaires.
Le mode de culture
Deux catégories se distinguent :
- les pommes de terre primeur (aussi appelées nouvelles), cultivées dans les régions à hiver doux. Plantées très tôt (de janvier à mars), elles alimentent le marché en pommes de terre récoltées avant maturité. Les variétés utilisées sont précoces, et leur cycle de végétation est court.
- les pommes de terre de conservation : elles constituent la majorité de la production. Les plantations ont lieu d’avril à mai, la récolte en fin d’été, à maturité naturelle ou provoquée par la destruction mécanique ou chimique du feuillage. Elles peuvent être cultivées dans toute la France.
La fermeté
Une pomme de terre à “chair ferme” aura une bonne tenue à la cuisson, tout comme une bonne qualité gustative. Elle peut être accommodée en salade, cuite à la vapeur ou sautée. Les tubercules ont généralement une forme allongée, de grosseur moyenne, et possèdent une chair à grain fin.
Les autres pommes de terre, n’ayant pas cette indication, auront une chair plus fine, et se prêteront à une plus grande variété de plats et de préparations culinaires. Ces pommes de terre sont utilisées par l’industrie agroalimentaire pour élaborer leurs plats transformés et ultra-transformés.
Les caractéristiques culinaires
Ces caractéristiques, que l’on retrouve généralement indiquées sur l’emballage des pommes de terre de manière assez visible, représentent la catégorisation la plus répandue en France. Elle permet d’orienter le choix du consommateur selon l’utilisation qu’il souhaite faire de la pomme de terre.
Pour pouvoir être classées, les pommes de terre subissent une batterie de tests, comme la mesure du taux de matière sèche pour connaître leur tenue à la cuisson (la pomme de terre contient en moyenne 80% d’eau), du taux de sucre pour assurer une bonne caramélisation, les tests d’éclatement ou encore de noircissement :
- les pommes de terre spéciales vapeur doivent avoir un taux de matière sèche inférieur à 21,5% de matière sèche. On trouve par exemple les Chérie, Ratte, Pompadour, Amandine ou encore Annabelle
- les pommes de terre pour four, purée, potages doivent avoir un taux de matière sèche situé entre 17,5 et 19,5%. On trouve par exemple les Blue Belle, Daisy, Désirée, Rosabelle, Spunta, Vitelotte ou encore Mélody
- les pommes de terre spéciales frites doivent avoir un taux de matière sèche situé entre 19% à 21%. Leur taux de sucre doit être inférieur à 0,4g/L, et leur indice de coloration doit être inférieur à 3,2. Les variétés les plus connues sont la Bintje, l’Agria, l’Artemis, la Caesar, la Marabel ou encore la Victoria.
Un peu d’histoire
À l’origine, la pomme de terre était cultivée au Pérou, sur les rives du lac Titicaca. Jusqu’au XVIe siècle, les européens ne la connaissaient pas ! Ce sont les conquistadors espagnols qui, après avoir découvert le Nouveau Monde, les ont rapportées en Europe.
Le succès ne fut pas immédiat, d’autant plus que les pommes de terre de l’époque n’étaient pas réellement celles que nous connaissons aujourd’hui ! Elle était plus amère et très difficile à cultiver. Elle va pourtant s’implanter dans plusieurs pays d’Europe, mais pas la France : ne figurant pas dans la Bible, la pomme de terre était soupçonnée de transmettre des maladies.
C’est au XVIIIe siècle que Antoine-Augustin Parmentier finit par ancrer dans la gastronomie française la pomme de terre : après deux famines successives en France, l’Académie des sciences organise un concours pour trouver le nouveau végétal pour compléter le blé. Parmentier avait été emprisonné dans les prisons prussiennes, et avait consommé beaucoup de pommes de terre : pour lui, c’est sûr, c’est la pomme de terre qui assure.
Il publie alors son Examen Chymique des pommes de terre (disponible gratuitement sur le site de la Bibliothèque Nationale de France), et parvient à convaincre les juges de l’Académie.
Il organise de plus des repas autour de la pomme de terre pendant lesquels il invite les scientifiques de l’époque, mais plante aussi des plants de pommes de terre près de Paris, et demande aux soldats qui les gardent de se retirer la nuit. Les paysans viennent les voler pour les manger, et commencent alors à leur tour à les cultiver sur leurs propres terres.
Les labels
La popularité de la pomme de terre en France a favorisé l’apparition de labels assurant (ou non) d’une bonne qualité de production, d’un respect du terroir ou des savoirs anciens. Afin de ne pas vous ennuyer avec des modalités législatives spécifiques à chaque cahier des charges, nous avons sélectionné quelques critères qui nous semblaient intéressants à connaître lors de l’achat, que nous avons référencé dans un tableau, comme pour le fromage ou l’huile d’olive.
Le tableau référence ainsi l’unique AOP (Appellation d’Origine Protégée), les deux IGP (Indication Géographique Protégée) et les cinq Label Rouge.
Vous pouvez, si vous souhaitez consulter un cahier des charges en particulier, vous rendre sur le site de l’INAO.
A ces labels français et européens, s'ajoutent le label biologique, et le label Origine France. Ce dernier ne garantissant qu’une origine très vague, nous nous attarderons plutôt sur le label bio.
Ce label semble avoir un réel intérêt pour le cas des pommes de terre : en effet, la pomme de terre est un tubercule assez fragile, en proie à de nombreux prédateurs. Les producteurs en conventionnel dispersent ainsi des traitements en préventif (herbicides et insecticides en particulier) pour éviter toute déconvenue. S’ajoute à cela le traitement antigerminatif pour pouvoir conserver les pommes de terre plus longtemps.
Vous le savez, nous prêchons souvent le réalisme optimiste. Il faut être réaliste : nous n'avons pas les capacités de changer le monde. Prenons l’exemple de l’écologie.
Un rapport de l’Agreste publié en 2019 disponible ici si vous le souhaitez, communiquait le nombre de traitements effectués sur plusieurs cultures en France : nous vous laissons juger par vous-mêmes.
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A ces chiffres pourraient s’ajouter les polluants contenus dans les boues d’épuration généralement utilisées dans les grandes cultures comme celle de la pomme de terre. Certains labels (cf tableau plus bas) les interdisent, tout comme le label bio, mais ce n’est largement pas systématique.
Tout cela nous pousse donc à penser que choisir des pommes de terre biologiques pourrait être bénéfique, autant pour les sols que pour notre santé.
Bonne nouvelle pour nous, le marché de la pomme de terre bio se porte très bien : alors que durant la campagne 2011/2012, le CNIPT (Comité National Interprofessionnel de la Pomme de Terre) comptait 795 hectares de cultures de pommes de terre, biologiques, il en compte pour la campagne 2019/2020 1700 hectares !
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La transformation des pommes de terre
Les industriels ont bien compris que les français aimaient les pommes de terre, mais pas forcément de perdre leur temps à les préparer ! De nombreuses gammes de plats préparés et autres accompagnements autour de la pomme de terre se sont donc créés : frites, purées en flocons, pommes dauphines, poêlées, gratin dauphinois ou encore hachis parmentier, il en a pour tous les goûts, et tous les budgets !
Le soucis est, comme souvent, que les pommes de terre sont accompagnées d’huiles végétales (huile de tournesol, de colza ou encore huile de palme dans la plupart des cas)et d’additifs (émulsifiants, conservateurs comme l’acide citrique, arômes, dextrose…) que nous n’ajouterions pas spontanément si nous faisions maison ces plats, et qui, selon notre compréhension actuelle, ne seraient pas idéaux, consommés régulièrement, pour notre santé.
Ces produits posent de plus le problème de l’origine (et donc de la qualité) des produits utilisés (cette mention n’est pas obligatoire), mais aussi, surtout pour le cas de la purée en flocons, de la perte de mastication, et donc potentiellement d’une surconsommation du produit.
Le processus de transformation des pommes de terre en flocons se passe en trois étapes principales :
- Préparation : les pommes de terre sont épluchées, coupées et lavées.
- Cuisson : les pommes de terre sont cuites puis écrasées en purée.
- Déshydratation : la purée est distribuée sur des cylindres sécheurs chromés traversés par la vapeur. Le film de pomme de terre déshydraté est déchiqueté et floconné.
Ces purées n’ont pas une liste d’ingrédients particulièrement longue, mais contiennent pour la plupart un émulsifiant, les mono- et diglycérides d'acides gras, et n’indiquent pas toujours l’origine des pommes de terre.
La marque la plus répandue sur le marché Mousline (qui appartient soit dit en passant au groupe Nestlé), offre un gamme de produits avec des pommes de terre origine France (mais, vous l’aurez compris, très probablement traitées), quelques produits aux pommes de terre origine Allemagne non bio, ou, pour la purée bio, origine UE/non UE.
Les pommes de terre les moins problématiques seraient à la rigueur les pommes de terre bio déjà épluchées et cuites sous vide, sans additifs, mais vous perdrez sûrement en goût.
Finalement, on achète quoi ?
Les pommes de terre sont des basiques à avoir toujours chez soi, faciles à préparer en avance, et très polyvalentes en cuisine. Acheter des pommes de terre déjà préparées vous fera certes gagner du temps, mais vous fera perdre en micronutriments, mais aussi en goût ! Privilégiez plutôt les préparations maison, pourquoi pas mettre un podcast (ou danser ;) ) pendant l’épluchage parfois fastidieux de vos pommes de terre !
L’idéal est de vous approvisionner au marché, auprès d’un producteur biologique dans le meilleur des cas. Cette solution est idéale également pour les petits budgets, puisque le prix des pommes de terre est généralement décroissant : plus vous en achetez, moins le prix au kilo sera important.
Petits conseils conservation pouvant être utiles si vous achetez en gros, pour éviter qu’elles noircissent, verdissent (les pommes de terre vertes sont toxiques), ou encore qu’elles germent trop vite (ce qui n’est en soit pas réellement un problème, vous pouvez ôter les germes puis les consommer) : l’idéal serait de les conserver à l’abri de la lumière, dans un endroit frais (6/8°C) et sec.
Si vous ne pouvez pas aller au marché, choisir des pommes de terre bio, d’origine France si possible (ne vous inquiétez pas, c’est très souvent le cas) est une très bonne alternative. Si vous pouvez avoir l’AOP Pommes de terre de l’Île de Ré en plus, c’est encore mieux ! Si ces pommes de terre sont trop chères pour votre budget, éplucher les pommes de terre avant cuisson enlèvera déjà une partie des pesticides et produits chimiques.
Vous pouvez également trouver au supermarché la marque du consommateur, C’est qui le Patron ? Il s’agit d’une coopérative créée en 2016, en réponse à la détresse des éleveurs laitiers qui voyaient le prix du lait baisser, jusqu’à vendre à perte leur lait. L’idée ? Ce sont les consommateurs qui choisissent les critères d’obtention des produits proposés : rémunération du producteur, type d’agriculture, contenant, poids… La proposition qui remporte le plus de votes est mise à produire, et le prix du produit varie donc selon les choix des consommateurs. La gamme de produits s’est depuis étoffée, et on peut trouver aujourd’hui des pommes de terre sous cette marque.
Si elles ne garantissent pas une absence totale de traitement, elles peuvent représenter une bonne alternative si vous ne trouvez pas de pommes de terre biologiques : elles sont cultivées en agriculture raisonnée, sans traitement chimique anti-germinatif, avec une rotation des cultures de 5 à 6 ans… Tous les critères sont disponibles sur leur site.
Pour ce qui est du choix de la variété, vous l’aurez compris, il dépendra de l’usage que vous ferez des pommes de terre. Pour les cuissons vapeur ou à l’eau (la cuisson que nous vous conseillons pour le quotidien), les variétés Amandine, Charlotte, IGP de Noirmoutier ou encore Label Rouge Pompadour seront idéales, toujours choisies bio de préférence.